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3 août 2006

02 août - Activiste des droits de l'homme au Katanga

Kolwezi - « Tout avocat est d'office activiste des droits de l'homme » martèle Maître Déo. A la sortie du Tribunal de Première Instance, ils se rassemblent autour de moi pour me raconter le vrai Kolwezi. Celui que l'on ne peut voir en se  promenant en ville, ou même en périphérie... « Ils ont moins de 18 ans, et ils travaillent, les enfants, et les femmes aussi, même parfois enceintes; il n'y a pas d'hygiène, pas de cache-nez, la radioactivité,... Ils creusent, sans aucune conscience des conséquences pour leur avenir, leurs poumons, leur coeur,... il y a des cancers aussi. » Par journée, une femme gagne moins de 500 francs congolais, moins de 1$. Un enfant, encore moins. Ils creusent, de manière artisanale. Sans moyens, sans protection, sans employeur, sans garantie de revenus.

Ces dernières années, l'Etat a vendu des concessions locales aux étrangers qui chassent les creuseurs, les privent de leur dérisoire revenu. Indiens, Libanais, Canadiens, Australiens... Ils font leurs affaires, en témoignent leurs véhicules, bijoux, les parures de leurs femmes... au détriment de la population à qui appartient cet eldorado.

ONG de droits de l'homme et Communauté internationale dénoncent de concert cette exploitation des travailleurs. Des revendications qui ont leurs effets, comme le témoigne ce programme de reconversion des femmes annoncé sur Radio Okapi ce matin : des parcelles de terre, des houes et le matériel dont elles ont besoin, et une prime journalière pour les activités agricoles effectuées... tout cela pour leur permettre d'alimenter convenablement leurs familles au quotidien.

Un programme soutenu, même si certains estiment qu'il faut remédier à cette problématique des enfants creuseurs comme avec celle des enfants soldats. Beaucoup reste à faire... Ils m'expliquent aussi la contamination des eaux qu'utilisent les ménagères des cités minières, mais aussi les arrestations arbitraires, les détentions de personnes libérées par ordonnance ou jugement par les autorités pénitencières qui exigent une redevance, les menaces téléphoniques envers leur propre personne et l'espionnage dont ils sont victimes lorsqu'ils enquêtent sur une personnalité influente... Ils me racontent les nuits sans dormir où ils ne peuvent rentrer chez eux, la mise en sécurité de leurs familles, les plans d'évacuation de leur bureau (les fenêtres, la proximité des commerces pour avoir des témoins...). Cette vie courageuse de l'activiste des droits de l'homme.

Ils m'expliquent les défaillances de l'Etat, l'absence de budget pour les établissements pénitenciers, et donc la faim des prisonniers qui, parfois à plus de 600km de chez eux, sont abandonnés par leurs familles et  dépendent de la charité locale qui vient les nourrir deux ou trois fois par semaine seulement...

« Le juge, il n'a même pas fait une semaine » m'explique Maître Déo. Je lis sa satisfaction d'avoir « reçu » un nouveau juge. La loi prévoit en effet qu'un Juge ne peut rester plus de 4 ans attaché à la même localité. « S'il reste longtemps, il se marie, il a des enfants, ils vont à l'école ici, il tisse son réseau de connaissances et affinités... Cela n'est pas bon pour les citoyens », continue Maître Déo. C'est le Haut Conseil de la Magistrature de Kinshasa qui décide de cette rotation des magistrats qui doit en principe leur permettre de garder toute leur partialité, indispensable à la justice équitable.

Le procès pour occupation illégale d'un immeuble auquel je viens d'assister me semble équitable. Les deux parties sont représentées par plusieurs avocats, le Président est entouré du Procureur et d'un Juge de la Commission Justice et Paix, mais aussi d'un représentant du Ministère public et d'un greffier, et il y a de nombreux témoins dans la salle.

Les avocats sont là, ils veillent. Sur leur carte de visite est inscrit « Défenseur », et non avocat, comme chez nous. Défenseur du peuple congolais... Si tous les avocats le sont, il en est certains qui le sont encore un peu plus et qui, tous les jours, risquent leur vie pour le respect des droits humains. Je voudrais par la présente rendre un hommage particulier aux membres de l'Association Africaine de Défense des Droits de l'Homme (ASADHO) et de CDH.

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